L’adoption, à l’unanimité, de la loi portant Vision Nationale de Développement à l’horizon 2060 a marqué un tournant majeur dans la gouvernance publique au Bénin. En s’inscrivant dans une vision de long terme, l’État béninois affirme clairement que le développement national doit désormais s’inscrire dans une trajectoire stable, prévisible et indépendante des intrigues politiques. Cette loi consacre une approche stratégique où les gouvernements passent, mais où la vision demeure, servant de boussole permanente à l’action publique. Dans ce cadre, la question de l’allongement du mandat présidentiel mérite d’être examinée avec rigueur. La Vision Bénin 2060 est précisément conçue pour éviter les ruptures, les recommencements et les tâtonnements liés aux changements de dirigeants. Elle fixe les grandes orientations économiques, sociales, institutionnelles et environnementales que chaque président est tenu de respecter. Autrement dit, un Chef de l’État peut achever son mandat de cinq ans, céder le pouvoir, et voir son successeur poursuivre le même cap, sans que la dynamique de développement ne soit remise en cause. La continuité est garantie par la vision, non par la durée du mandat. Par ailleurs, l’argument selon lequel un mandat plus long serait nécessaire pour mener à bien les réformes se heurte à la réalité de la planification déjà en vigueur. Les grandes priorités de l’État sont connues ainsi que les réformes structurantes engagées. Dans ces conditions, l’allongement du quinquennat apparaît moins comme une exigence de développement que comme un choix politique, puisque les outils de continuité existent déjà. L’argument de la continuité de l’État, régulièrement invoqué par les autorités, renforce cette interrogation. Si l’État est une continuité au-delà des hommes, alors la stabilité des politiques publiques repose sur les institutions, les lois et les visions stratégiques, et non sur la prolongation des mandats. La Vision 2060 joue précisément ce rôle de socle commun, en traçant les grandes lignes et les priorités nationales pour plusieurs décennies. Elle oblige chaque gouvernement à s’inscrire dans un cadre préétabli, rendant ainsi superflu l’allongement des mandats au nom de la stabilité. En définitive, la loi « Vision Bénin 2060 » pose une question fondamentale. Si le développement du pays est désormais balisé jusqu’en 2060, avec des orientations claires et partagées, à quoi sert réellement de prolonger la durée du mandat présidentiel de 5 a 7 ans ? Soit la vision est suffisamment robuste pour garantir la continuité et rendre les mandats courts efficaces, soit elle ne l’est pas, et sa portée serait alors à relativiser. Dans les deux cas, le débat sur l’allongement des mandats apparaît moins comme une nécessité technique que comme un choix politique, que la Vision 2060, en tant qu’outil stratégique de long terme, ne rend ni indispensable ni incontournable.
*Dynamisme Info